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n° 56 – Janvier-Février 2025
La Lettre d’information en bref
- Présentation des innovations de la loi de finances pour 2025 en matières douanière et de fiscalités énergétique et environnementale.
- Focus sur la transformation expérimentale de douze tribunaux de commerce en « Tribunaux des activités économiques » et la création d’une « contribution pour la justice économique » à compter du 1er janvier 2025.
- La jurisprudence en droit des transports :
- La Cour d’appel de Nîmes a considéré dans un arrêt du 6 décembre 2024 qu’en l’absence de preuve du cerclage ou du filmage d’une palette, celle-ci ne pouvait être considérée comme constituant un colis au sens du contrat-type applicable aux transports routiers de marchandises pour lesquels il n’existe pas de contrat- type spécifique, mais qu’il fallait considérer comme colis chacun des cartons posés sur la palette.
- La jurisprudence en matière douanière :
- La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rendu un arrêt sur le cumul entre une amende douanière et une mesure de confiscation.
- La CJUE a statué sur le droit des Etats membres de limiter territorialement l’activité d’un représentant en douane constitué en société de capitaux.
- En matière de ventes à distance de produits alcooliques soumis à droit d’accise, la CJUE a précisé un cas dans lequel le vendeur établi dans un Etat membre peut être redevable des droit à destination dans un autre Etat membre.
- En matière de classement tarifaire, la CJUE a rendu deux arrêts sur le classement tarifaire des huiles de poisson et les véhicules pour personnes à mobilité réduite.
Après une longue errance résultant de la conjoncture politique, la loi de finances pour 2025 n° 2025-127 du 14 février 2025 a enfin été publiée.
A la faveur de l’absence de majorité à l’Assemblée, le Sénat a marqué très fortement le texte qui a été globalement adopté tel quel par la commission mixte paritaire, puis par les deux Chambres.
Aucune des dispositions citées ci-dessous n’a été déclarée contraire à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2025-874 du 13 février 2025. De nombreuses modifications sont opérées dans les matières relevant de la spécialité du Cabinet, à savoir le droit douanier et les fiscalités de l’énergie et de l’environnement, plus généralement les impositions des biens et des services.
Onze articles viennent ainsi réformer le Code des douanes (CD). Seize articles apportent des modifications substantielles au Code des impositions sur les biens et services (CIBS) qui n’a pourtant que trois ans. Deux textes ont été commentés parmi d’autres modifications du Code général des impôts (CGI). Les principales innovations sont les suivantes.
Nous n’avons pas commenté tous les articles modifiant les trois codes cités. Les lecteurs sont priés de se reporter au texte publié, dans lequel ils pourront également examiner des articles non commentés ici faute de place, à savoir concernant le Code des douanes les articles 38, 48, 54, pour le CIBS, les articles 23, 26, 28, 30, 38 et 119.
Ces textes portent de près ou de loin sur des problématiques liées à l’imposition sur les biens et services, sans préjudice des autres dispositions fiscales dans le CGI.
L’article 23 exclut les carburéacteurs des obligations s’imposant aux différents carburants dans le cadre de la TIRUERT (taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans le transport).
Cette taxe constitue une fiscalité incitative afin d’encourager l’utilisation de carburants durables. Les carburéacteurs avaient été inclus dans l’assiette de la taxe en 2022.
Un amendement a fait observer que le règlement communautaire n° 2023/2405 du 18 octobre 2023 « ReFuelEU Aviation » est entré en vigueur le 1er janvier 2025 et que son dispositif est incompatible avec la taxe nationale. De plus, le Parlementaire fait observer que l’application de la TIRUERT aux carburéacteurs a affaibli la compétitivité des compagnies aériennes françaises, car les prix facturés après la mise en place de la TIRUERT étaient devenus supérieurs à ceux la concurrence.
A l’article 25, un amendement a proposé d’inclure dans l’assiette de la TIRUERT l’hydrogène utilisé par les motorisations thermiques à combustion interne fonctionnant à l’hydrogène équipées de piles à combustible. Les quantités d’hydrogène livrées à ces véhicules pourront donc être comptabilisées pour atteindre le taux minimal d’utilisation d’hydrogène pour bénéficier d’une minoration du taux de la TIRUERT. L’extension de la comptabilisation de l’hydrogène à celui utilisé par ces véhicules permettrait d’engager plus rapidement une transformation en faveur d’une industrialisation de la filière de l’hydrogène. L’article 266 quindecies CD a été modifié à compter du 1er janvier 2026.
L’article 76, introduit en première lecture au Sénat par un amendement du Gouvernement, procède à un durcissement des procédures de recouvrement en matière douanière. L’administration pourra ainsi fixer des délais impératifs pour la communication des documents sollicités dans le cadre de l’article 65 CD. En cas de redressement suivi d’un avis de mise en recouvrement (AMR), les règles de sursis à paiement prévues par l’article 348 CD sont durcies.
Un nouvel article 348 bis CD restreint les possibilités d’obtenir un sursis à paiement, à savoir pouvoir contester sans devoir acquitter la somme redressée, ni constituer une garantie. Les règles d’indemnisation en cas de responsabilité de la puissance publique pour saisie non fondée, prévues à l’article 402 CD, sont aussi restreintes. Le taux de l’intérêt légal est substitué à l’indemnité de 1 % par mois qui existait de longue date.
Les articles 78 et 79 aménagent la perception de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur les déchets aménageant des « réfactions » sur les taux de la taxe de 35 % en Corse et des réfactions différenciées suivant les départements d’Outre-Mer en fonction des investissements en cours ou à engager en faveur du tri pour la valorisation-matière des déchets, de 2029 à 2034.
A l’article 80, l’article 266 sexies CD sur la « TGAP déchets » a été complété pour étendre l’exonération accordée aux Combustibles Solides de Récupération (CSR) pour la production de chaleur ou d’électricité. Or, les CSR sont également valorisés pour la production de gaz. Une exonération ad hoc de TGAP est apparue bienvenue pour permettre le développement de cette filière des CSR. L’exemption de TGAP s’appliquera aux CSR réceptionnés aux fins de production de gaz bas-carbone au sens de l’article L.447-1 du Code de l’énergie.
A l’article 17, le législateur a complètement remis à plat le mécanisme de cession de l’électricité par rapport aux fournisseurs alternatifs d’électricité dans le cadre de la fin programmée du mécanisme ARENH (Accès Régulé à l’Electricité Nucléaire Historique, existant depuis 2011).
Ce mécanisme conçu pour quinze ans avait montré ses limites lors de l’explosion des prix de l’électricité en 2022, et s’avérait défavorable à la capacité d’investissement EDF.
Comme le note le Sénat n° 144 du 21 novembre 2024, il s’agit « d’un nouveau dispositif [dénommé « partage des revenus de l’exploitation des centrales électronucléaires historiques »] composé de deux volets :
– un premier volet fiscal prélèverait une part des revenus tirés par EDF de son parc nucléaire selon certains seuils et en fonction du prix auquel la société aura pu vendre son électricité sur les marchés de gros ;
– un deuxième volet de redistribution des sommes collectées qui devra permettre, via les fournisseurs d’électricité, de répercuter intégralement aux consommateurs le produit de la taxe. ».
La répercussion, dénommée « versement nucléaire universel », prendra la forme en 2026 d’une minoration des factures d’électricité des consommateurs.
Ce dispositif est conçu pour protéger les consommateurs d’une nouvelle très forte hausse du prix de l’électricité. Il évoluera sans doute.
L’article 18 intègre dans le CIBS les taxes sur les installations nucléaires de base.
L’article 19 modifie le « mécanisme de capacité » qui permet d’apporter une rémunération complémentaire aux installations de production d’électricité qui participent à l’atteinte des objectifs de sécurité d’approvisionnement. Ce mécanisme sera centralisé par l’établissement RTE et un prélèvement a été créé, la « taxe sur l’utilisation du système électrique aux heures de tension ».
Ce prélèvement finance le coût d’achat des « engagements de disponibilité » qui permettent de faire face aux périodes de tension du réseau.
L’article 20 procède à un nouvel aménagement des tarifs en matière d’accises notamment sur l’électricité. Le taux de TVA passe de 5,5 à 20% sur les abonnements gaz et électricité, pour donner suite à une critique communautaire. Les combustibles fossiles et l’électricité font l’objet d’une majoration des droits d’accise pour y intégrer les coûts de péréquation des prix de revient supérieurs de l’électricité dans les zones non interconnectées (ZNI).
Une autre majoration (1,16 € / MWh) est introduite pour inclure le montant qui était prélevé dans le cadre d’une contribution pour alimenter le « compte d’affectation spéciale » pour le « financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale » (dit « CAS Facé ») qui posait des problèmes de conformité au droit communautaire. L’affectation du montant de 2024 au « CAS » est maintenue. Le Sénat y a veillé.
Les majorations sur les droits d’accise applicables au profit des régions, déjà à leur taux maximum, sont intégrées dans l’accise de base pour chaque produit, par simplification et sans coût supplémentaire pour les consommateurs. Une majoration prévue spécifiquement en faveur de l’Ile-de-France sera supprimée le 1er janvier 2026.
Le Gouvernement a tiré profit de la très forte baisse du prix de l’électricité en 2025, mais a dû accepter après les débats parlementaires au Sénat de ne pas complètement revenir au taux de l’accise sur l’électricité existant avant 2022. Le Sénat a notamment obtenu la suppression d’une mesure qui prévoyait d’habiliter le Gouvernement à augmenter l’accise sur l’électricité entre 5 et 25 € / MWh par voie d’arrêté ministériel.
L’Etat parvient néanmoins malgré ces différentes majorations à garantir une baisse du TRVE (tarif réglementé de la vente d’électricité) de 9% au 1er février 2025.
Les entreprises électro intensives qui bénéficieront encore de taux réduits (cf. infra) les conserveront au plancher de 0,5 € / MWh pendant l’année 2025 qui sera la dernière année d’application, sur une base désormais très réduite, du « bouclier tarifaire ».Il aura coûté près de 50 milliards d’euros.
L’article 21 a procédé, à la suite d’un amendement du président de la commission des finances du Sénat, à une restructuration des taux réduits dont bénéficient les entreprises électro-intensives. Le bénéfice de ces taux réduits tend à être réservé aux entreprises du secteur de l’industrie manufacturière exposées à la concurrence internationale. Des dispositions s’appliqueront le 1er mars 2025, le reste le 1er janvier 2026.
La fiscalité des véhicules et les malus sur leurs émissions de CO2 et sur leur masse a été refondue dans le cadre des articles 27, 28 et 29, y compris sur certains véhicules d’occasion.
A l’article 72, les conséquences sont tirées de la suppression de la trajectoire de hausse du gazole non routier utilisé pour les besoins des travaux agricoles et forestiers, à la suite des manifestations des agriculteurs de l’hiver 2024. Le tarif reste donc fixé à 3,86 euros / MWh. Ce maintien s’applique rétroactivement à compter du 1er janvier 2024.
L’article 75 comporte de très nombreuses clarifications et mesures de corrections ou coordinations en matière de fiscalité sectorielle. L’article résultant des travaux parlementaires tel qu’adopté par la Commission mixte paritaire le 31 janvier 2025, représente 175 alinéas de corrections et remises en ordre.
Le diable se cache dans les détails. Le législateur et l’administration ont manifestement conservé leurs mauvaises habitudes de textes bavards et instables.
Le législateur a reporté de deux ans à 2027 le recouvrement de la fiscalité pétrolière par la Direction Générale des Finances Publiques. Le suivi informatique n’est pas prêt. La Douane conservera d’importantes prérogatives de contrôle des opérateurs pétroliers (raffineries, dépôts, etc.) dans le domaine de l’ancienne « taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques » (TICPE) devenue « accise sur les produits énergétiques ».
Le texte opère le transfert des dispositions de l’article 285 CD (abrogé) concernant les redevances constituant les « droits de port » vers l’article L.5321-3 du Code des transports. La compétence de l’administration des douanes subsiste pour constater, recouvrer et contrôler les redevances composant les droits de port. Les réclamations restent présentées, instruites et jugées selon les règles applicables aux droits de douane (voir le paragraphe VI de l’article 75).
A l’article 32, le taux de TVA de 20% s’appliquera dorénavant (et plus 5,5 % ou 10 % selon les cas) à la fourniture et l’installation des chaudières à combustibles fossiles (lire : gaz naturel), aux articles 278 et 278-0 bis du Code général des impôts (article 32). Il s’agit là d’une transposition partielle d’une directive 2024/1275 du 24 avril 2024. Comme pour les véhicules diesel il y a dix ans, les chaudières à gaz tant encouragées corroborent désormais l’antique maxime qu’« il n’y a pas loin entre le Capitole et la roche Tarpéienne ».
L’article 40 modifie l’article 277 A du Code général des impôts pour étendre le bénéfice de la suspension de TVA au secteur aéronautique. La suspension de TVA découle traditionnellement du placement de marchandises importées à destination de ce secteur sous le régime douanier du « perfectionnement actif aéronautique ».
Les opérations comprises, en aval des importations, entre la date de sortie des pièces du « PAA » d’une part, et de la livraison du produit fini d’autre part, posaient un problème de sécurité juridique que le texte vient résoudre en étendant le bénéfice de cette suspension de TVA.
Par application de la loi n°2023-1059 du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, douze tribunaux de commerce ont été transformés en tribunaux des activités économiques (« TAE ») à titre expérimental.
Il s’agit des tribunaux de Marseille, Saint-Brieuc, Nancy, Lyon, Le Mans, Paris, Le Havre, Versailles, Avignon, Limoges, Auxerre et Nanterre.
Cette expérimentation est prévue pour une durée de quatre années à compter du 1er janvier 2025.
Au-delà d’un changement de dénomination, les compétences de ces tribunaux sont étendues notamment aux procédures collectives concernant les agriculteurs, les associations, les sociétés civiles et les professions libérales (à l’exclusion des professions juridiques et judiciaires règlementées).
L’un des apports les plus remarqués (et contestés) de cette loi est la création d’une contribution pour la justice économique (« CJE »), dont les modalités ont été fixées par le décret n°2024-1225 du 30 décembre 2024 relatif à l’expérimentation de la contribution pour la justice économique, et explicitées par une circulaire du 6 février 2025.
Certains demandeurs, déterminés par ledit décret, devront s’acquitter de cette nouvelle taxe pour toute instance enrôlée après le 1er janvier 2025.
En vertu de ce décret, la CJE est due par l’auteur de la demande initiale, lorsque la valeur totale des prétentions qui y sont contenues est supérieure à un montant de 50 000 euros.
Les demandes incidentes et les sommes demandées au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ne sont pas prises en compte dans le calcul de cette valeur totale.
Lorsque la demande initiale est formée par plusieurs demandeurs, la CJE est due par chacun d’eux, et la valeur totale des prétentions est appréciée séparément pour chacun.
Sont assujettis à cette contribution :
- les demandeurs employant plus de 250 salariés, dont le chiffre d’affaires annuel moyen sur les 3 dernières années est supérieur à 50 millions d’euros et dont le bénéfice annuel sur les trois dernières années est supérieur à 3 millions d’euros,
- les demandeurs employant plus de 250 salariés, dont le chiffre d’affaires annuel moyen sur les trois dernières années est supérieur à 1,5 milliards d’euros.
Pour la première catégorie de demandeurs, le montant de la CJE sera de 3 % du montant de la valeur totale des prétentions figurant dans l’acte introductif d’instance, dans la limite d’un montant maximal de 50 000 euros.
Pour la seconde catégorie de demandeurs, la CJE sera de 5 % du montant de la valeur totale des prétentions figurant dans l’acte introductif d’instance, dans la limite d’un montant maximal de 100 000 euros.
Le montant de la CJE sera calculé par le Greffe, avant la première audience, sur la base de documents justifiant la situation financière du demandeur. En pratique, le Greffe se fondera sur une déclaration sur l’honneur remise par le demandeur lors de l’enrôlement.
La CJE devra être réglée sous peine d’irrecevabilité des demandes que le juge pourra prononcer d’office.
La CJE sera conservée par le Greffe, sur un compte de dépôt dédié dont les intérêts seront reversés chaque trimestre au budget général de l’Etat, jusqu’à l’épuisement des voies de recours.
La CJE sera remboursée en cas de désistement ou de transaction.
L’article 27 de la loi n°2023-1059 du 20 novembre 2023 précise que les dispositions du Code de procédure civile relatives aux dépens sont applicables à cette contribution.
Par conséquent, le défendeur pourra être condamné à en supporter la charge.
Le défendeur avisé veillera ainsi dorénavant à invoquer l’application de l’article 696, alinéa 1 du Code de procédure civile, selon lequel le juge, par décision motivée, pourra décider de mettre la totalité ou une fraction des dépens à la charge d’une autre partie que la partie perdante.
La création de cette nouvelle taxe n’étant applicable pendant la période d’expérimentation qu’aux douze TAE, le demandeur sera tenté d’éviter de saisir l’un de ces tribunaux au profit d’un tribunal de commerce. Cela donnera lieu à du forum shopping, voire à des modifications de clause attributive de juridiction, au détriment des TAE.
Le calcul de la CJE étant établi à partir du montant de la valeur totale des prétentions figurant dans l’acte introductif d’instance, le demandeur sera également tenté de minorer le montant de ses demandes dans son assignation (pour l’augmenter ensuite dans ses conclusions). Ce jeu d’équilibriste devra toutefois être réalisé en veillant à écarter tout risque de prescription des demandes.
Enfin, des recours vont bientôt été formés devant le Conseil d’Etat contre le décret n°2024-1225 du 30 décembre 2024 relatif à l’expérimentation de la contribution pour la justice économique.
La CJE n’a donc pas fini de faire parler d’elle.
La Cour d’appel de Nîmes a jugé dans un arrêt du 6 décembre 2024 (n°22/03564) qu’en l’absence de de preuve du cerclage ou du filmage d’une palette, celle-ci ne pouvait être considérée comme constituant un colis au sens du contrat-type applicable aux transports routiers de marchandises pour lesquels il n’existe pas de contrat-type spécifique.
En l’espèce, le transporteur s’était vu confier le transport de 113 cartons de bouteilles de vin conditionnés en quatre palettes pour un poids total de 1,5 tonnes. Les marchandises n’étant jamais arrivées à destination, l’expéditeur-vendeur s’est retourné contre le transporteur.
Celui-ci soutenait que chaque palette constituait un colis et que l’indemnisation devait donc être limitée à 1 000 € par colis en vertu du contrat-type.
Pour mémoire, l’article 22.1 du contrat-type précité stipule que, s’agissant de la perte ou avarie de la marchandise, « le transporteur est tenu de verser une indemnité pour la réparation de tous les dommages justifiés, dont il est légalement tenu pour responsable, résultant de la perte totale ou partielle ou de l’avarie de la marchandise. Hors les cas de dol et de faute inexcusable du transporteur, l’indemnisation du préjudice prouvé, direct et prévisible, s’effectue dans les limites suivantes : -pour les envois inférieurs à trois tonnes, cette indemnité ne peut excéder 33 € par kilogramme de poids brut de marchandises manquantes ou avariées pour chacun des objets compris dans l’envoi, sans pouvoir dépasser 1.000 € par colis perdu, incomplet ou avarié, quels qu’en soient le poids, le volume, les dimensions, la nature ou la valeur ».
L’article 2.1 précise que « par colis ou unité de chargement, on entend un objet ou un ensemble matériel composé de plusieurs objets, quels qu’en soient le poids, les dimensions et le volume, constituant une charge unitaire lors de la remise au transporteur (bac, cage, caisse, cantine, carton, conteneur autre que UTI, enveloppe, fardeau, fût, paquet, palette cerclée ou filmée par le donneur d’ordre, rolls, sac, valise, etc) même si le contenu en est détaillé dans le document de transport ».
La Cour a relevé qu’il n’était pas mentionné sur la lettre de voiture, ni sur aucune autre pièce versée au débat, que les palettes litigieuses avaient été cerclées et/ou filmées.
La Cour a alors considéré que les palettes n’étaient pas des colis au sens de l’article 2.1 du contrat-type, mais que chacun des 113 cartons de bouteilles de vin transportés constituait un colis.
La Cour a donc appliqué le plafond d’indemnisation de 1 000 euros par carton de bouteilles de vin, soit un plafond de 113 000 euros. Le poids total des marchandises transportées étant de 1,5 tonnes, la Cour a jugé que l’indemnisation totale devait être limitée à 33 € x 1 500 kg, soit 49 500 €.
La valeur totale des marchandises, de 6 986 €, étant inférieure au plafond de limitation, le vendeur-expéditeur a pu être indemnisé de la totalité de son préjudice.
Par conséquent, le transporteur routier sera avisé de veiller à ce que les marchandises transportées sur palette soient filmées et/ou cerclées, et à ce que cela soit mentionné sur la lettre de voiture, afin que la palette soit considérée comme un seul colis, et limiter ainsi le montant de l’indemnisation en cas de perte et/ou avarie.
Au contraire, il sera préférable pour l’expéditeur d’éviter un filmage ou un cerclage des marchandises afin d’obtenir une meilleure indemnisation. Cependant, le risque de survenance de dommages aux marchandises sera plus élevé du fait de l’absence de filmage/cerclage, compte tenu du risque de chute des marchandises.
En tout état de cause, la meilleure protection pour les intérêts-marchandises reste la déclaration de valeur, celle-ci permettant d’écarter l’application des limitations de responsabilité en vertu de l’article 22.2 du contrat-type.
Par un arrêt du 19 décembre 2024 (C-717/22) la CJUE a statué sur les sanctions pouvant être infligées en cas de contrebande.
Lors d’un contrôle à l’entrée en Bulgarie, les douanes bulgares avaient contrôlé un camion qui transportait treize colis de profilés en aluminium, chargé en Turquie et constaté que huit des treize colis n’avaient pas été déclarés sur les documents d’accompagnement. Le conducteur était présent au moment du chargement, du pesage de la cargaison mais n’avait pas déclaré ces huit colis.
L’administration bulgare avait reproché sa négligence au conducteur et lui avait infligé une amende d’environ 37 400 € correspondant à la valeur douanière des profilés d’aluminium retrouvés dans les huit colis non déclarés et avait ordonné la confiscation au profit de l’Etat bulgare de ces profilés d’aluminium en infraction.
Le juge de renvoi avait saisi la Cour de justice car il lui semblait que la confiscation des produits faisant l’objet de la contrebande douanière quel que soit leur propriétaire pourrait entrer « en contrariété avec les dispositions des droits de l’Union, lorsque ces produits appartiennent à une personne autre que l’auteur de l’infraction administrative ou lorsque l’auteur a commis cette infraction par négligence. » (point 24)
L’addition de l’amende et de la confiscation semblait contraire également au principe de proportionnalité consacré par l’article 42 §1 du Code des douanes de l’Union lu en combinaison avec l’article 49 §3 de la Charte des Droits fondamentaux.
Devant le juge de renvoi, le conducteur s’était défendu de toute intention coupable. Le juge national considérait que son droit pouvait être non conforme au droit communautaire, car trop sévère.
La CJUE a considéré que ces marchandises qui allaient de Turquie vers la Serbie auraient dû être placées sous le régime du transit communautaire externe. Il existait donc bien une « inobservation », qui est en droit une infraction à la législation douanière. La Cour rappelle, qu’« il importe peu de savoir si cette inobservation a été intentionnelle ou si elle a été commise par négligence ou en l’absence de tout comportement fautif de l’opérateur concerné. » (point 45).
La négligence ayant ainsi été retenue à l’encontre du conducteur, la question se posait comment on devait la sanctionner. La Cour indique que « la rigueur des sanctions doit être en adéquation avec la gravité des violations qu’elles répriment, notamment en assurant un effet réellement dissuasif, tout en respectant l’exigence de proportionnalité. » (point 49)
Toutefois, la Cour de justice a considéré que l’amende prévue par le droit bulgare compris entre 100 et 200 % de la valeur en douane des marchandises en infraction était démesurée (point 50). La Cour de justice indique que les articles 15 et 42 du CDU s’opposent à ce que dans le contexte d’un transit communautaire externe, « une sanction administrative d’un montant correspondant, à, au moins, la valeur en douane des marchandises faisant l’objet de cette infraction soit infligée à la hauteur de ladite infraction. » (point 54)
La question se posait de savoir ensuite si la confiscation était autorisée par l’article 42 § 2 du CDU qui semblait limitatif pour le juge national.
La CJUE indiquait qu’il n’en était rien « et que les Etats membres peuvent, en principe, prévoir d’autres sanctions administratives que celles mentionnées à ladite disposition, telles que les mesures de confiscation des marchandises ayant fait l’objet d’une infraction douanière. » (point 59)
La CJUE rappelle sa jurisprudence sur le fait que « la confiscation de marchandises appartenant à un tiers de bonne foi ne peut pas être prononcée car elle est incompatible avec le droit de propriété garantie à l’article 17 §1 de la Charte ». (point 60).
Il en va différemment si le tiers n’est pas de bonne foi, de manière à conférer aux sanctions douanières tout leur caractère dissuasif.
La CJUE considère que « la confiscation, en tant que sanction complémentaire, de ces marchandises lorsqu’elles appartiennent à une personne à laquelle une infraction au Code des douanes de l’Union est imputable, apparaît proportionnée tout en étant susceptible de dissuader les opérateurs concernés de violer les obligations découlant de ce code et d’empêcher que ces opérateurs puissent en tirer bénéfice. » (point 66).
La question qui restera à trancher par la juridiction nationale consistera donc à savoir si l’infraction douanière pouvait éventuellement être imputable au propriétaire qui était Serbe.
La CJUE a également répondu à une question du juge bulgare sur le point de savoir si l’article 2 §1 d’une décision-cadre 2005/212/JAI du Conseil du 24 février 2005 relative à la confiscation des produits, des instruments et des biens en rapport avec le crime, pouvait s’appliquer.
La CJUE a répondu par la négative, dès lors que la confiscation a été ordonnée dans le cadre d’une procédure administrative et non pas une procédure pénale.
Cette décision dénote ainsi la sévérité de la jurisprudence de la Cour de justice en matière douanière à l’encontre des opérateurs économiques.
La Cour rappelle toutefois l’obligation pour le juge de procéder à une appréciation du régime des sanctions applicables à cette infraction de manière qu’il soit « dans son ensemble, conforme à l’exigence de proportionnalité. »
Par un arrêt du 7 novembre 2024 (C-503/23), la CJUE a statué sur l’interprétation de l’article 18 du Code des douanes de l’Union concernant les conditions d’exercice de l’activité de représentant en douane (« représentant en douane enregistré en France » / RDE).
Il s’agissait en l’espèce d’un représentant italien personne morale qui avait été agréé pour exercer son activité en Ligurie, en Piémont et dans la vallée d’Aoste en Italie. A la suite de l’expansion de ses activités, le représentant avait demandé à pouvoir exercer dans la province de Vicence, ce que l’administration avait refusé car cette province se situait hors de la direction interrégionale ayant accordé l’autorisation.
La première question se posait, dès lors qu’un représentant en douane était agréé dans un Etat membre, si celui-ci pouvait restreindre cet agrément à une portion géographique dudit Etat.
La CJUE a validé le droit italien, considérant que l’article 18 permettait aux Etats membres ce type de restriction (point 44).
La Cour de justice a également apprécié la portée de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, pour les représentants en douane.
La CJUE a rappelé que l’activité de représentant en douane « correspond à la notion même de « service », telle que définie à l’article 4.1 de cette directive en tant qu’il s’agit d’une activité économique non salariée, exercée normalement contre rémunération. » (point 58).
L’activité des représentants en douane relève donc du champ d’application de cette directive 2006/123. Celle-ci permet aux Etats membres de subordonner l’exercice d’une activité à des « régimes d’autorisation [qui] doivent reposer sur des critères qui encadrent l’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités compétentes afin que celui-ci ne soit pas utilisé de manière arbitraire. » (point 66).
Les exigences sont fixées par l’article 15 de la directive.
En l’occurrence, les exigences sont que les représentants « ne peuvent bénéficier de l’agrément d’un lieu permettant l’accomplissement des formalités douanières sans présentation physique des marchandises à un bureau de douane que lorsque ce lieu se situe dans ce département douanier » à savoir les trois provinces précitées dépendant de la direction interrégionale douanière compétente.
La CJUE s’est donc interrogé si cette « exigence » était conforme à la directive. Dans le cadre de sa jurisprudence antérieure, ce genre de restrictions « doit s’appliquer de manière non discriminatoire en fonction de la nationalité et [elle] doit être nécessaire et proportionnée aux objectifs qu’elle poursuit » (point 78).
La CJUE s’est prononcée sur la conformité du droit national à la réglementation communautaire. Ainsi, au point 86 la CJUE souligne que « la limitation territoriale à laquelle sont soumis les [RDE] permet de maintenir un lien géographique entre les lieux où les [RDE] exercent leur activité et le département douanier dans le ressort duquel ils ont leur siège. » Cela permet « d’accroître l’efficacité des contrôles sur place, en permettant, ainsi que l’indique le gouvernement italien, de garantir un contrôle préventif et constant. » (point 87).
Cela étant, les déclarants exerçant individuellement dits « commissaires en douane » peuvent présenter des déclarations douanières dans l’ensemble du territoire italien, ce qui n’apparaît pas complètement cohérent avec la mesure restrictive vis-à-vis des représentants exerçant sous forme de société. La CJUE considère également que cette mesure restrictive va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif de lutte contre la fraude car des mesures moins contraignantes pourraient être utilisées pour garantir l’efficacité des contrôles douaniers (§93).
La CJUE demande donc au juge de renvoi d’examiner « si l’échange entre les bureaux douaniers des informations nécessaires aux contrôles des formalités douanières accomplies par les [RDE] prévue à l’article 8 §3 du décret ministériel permettrait d’atteindre le même résultat que la mesure en cause au principal, tout en constituant une mesure moins attentatoire à la libre prestation de services … » (point 94)
Par un arrêt du 19 décembre 2024 (C-596/23), la CJUE a examiné des achats en ligne de produits soumis à accise dans un autre Etat membre. Une société allemande avait créé un site internet dont les pages étaient rédigées en allemand mais également en langue finnoise de manière à pouvoir être comprises par des personnes établies en Finlande.
Les acheteurs, notamment finlandais, acquéraient des produits alcooliques auprès de ce vendeur allemand qui recommandait un certain nombre de sociétés de transport parmi lesquelles l’acheteur devait faire un choix pour pouvoir se faire livrer la marchandise. L’administration des accises de Finlande avait diligenté un contrôle auprès d’un acheteur.
La Douane avait redressé les ventes faites par la société allemande sur le fondement de l’article 36 de la directive 2008/118/CE du 16 décembre 2008, en vigueur à l’époque des faits (2020) transposé en droit local qui dispose que « les produits soumis à accise déjà mis à la consommation dans un Etat membre qui sont achetés par des personnes autres qu’un entrepositaire agréé ou un destinataire enregistré établi dans un autre Etat membre qui n’exerce pas d’activité économique indépendante, et qui sont expédiés ou transportés dans un autre Etat membre directement ou indirectement par le vendeur ou pour le compte de celui-ci, sont soumis aux droits d’accise dans l’Etat membre de destination. » Le paragraphe 3 précise notamment que « la personne redevable des droits d’accise dans l’Etat membre de destination est le vendeur. »
Ainsi, l’administration finlandaise considérait que les produits avaient été « expédiés ou transportés dans un autre Etat membre directement ou indirectement par le vendeur ou pour le compte de celui-ci… » La CJUEa donné raison aux autorités finlandaises au regard de la grande imbrication constatée jusqu’au site internet du vendeur entre celui-ci et les transporteurs intervenant pour l’expédition des produits commandés.
Comme le relève le point 32 de l’arrêt de la Cour de justice, « le site internet de la société disponible également en langue finnoise, recommandait aux acheteurs des boissons alcooliques commercialisées, au moyen de ce site, des sociétés de transport qui y étaient identifiées. En outre, ledit site internet fournissait des informations sur les frais de transport supportés par l’acheteur décidant de recourir à l’une de ces sociétés et contenait un lien vers le site internet de chacune desdites sociétés, vers lequel, une fois l’un de ces liens activé par l’acheteur, des informations sur les produits à transporter étaient transmises sans intervention de cet acheteur. » Constatant que « le vendeur agit de manière à guider le choix de l’acheteur quant à la société chargée de l’expédition et / ou du transport des produits achetés sur son site internet » (point 33), le vendeur « doit être considéré comme participant indirectement à l’expédition et / ou au transport des produits soumis à accise à l’Etat membre de destination… » (point 34)
Le terme « indirectement » à l’article 36 permet, comme l’indique la Cour de justice, de couvrir non seulement l’exécution de la prestation de transport par le vendeur mais aussi « … d’autres hypothèses, parmi lesquelles celle où le vendeur dirige indirectement l’expédition et / ou le transport en offrant au consommateur de choisir entre des expéditeurs et/ou transporteurs, qu’il recommande. » (point 35).
Ainsi, « l’acquittement des droits d’accise reflète la réalité économique de la transaction, abstraction faite de tout formalisme » (point 37), comme l’avait proposé l’avocat général dans ses conclusions.
La CJUE a rendu deux décisions en matière de classement tarifaire.
Fractions d’huile de poisson estérifiées
Un arrêt du 12 décembre 2024 (C-388/23) porte sur l’interprétation de la position 1516 concernant les graisses et huiles animales, végétales et leurs fractions partiellement ou totalement hydrogénées, inter estérifiées, réestérifiées ou élaïdinisées même raffinées mais non autrement préparées.
Le litige portait sur des fractions d’huile de poisson, se présentant sous forme d’esters éthyliques. A la suite d’une demande de renseignement tarifaire contraignant, l’administration fiscale néerlandaise avait classé ce produit sous la position 2106 90 92 de la nomenclature combinée. Il s’agit d’une position résiduelle visant les « préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs », sans matière grasse provenant du lait, saccharose, isoglucose, glucose, amidon, etc.
La société importatrice considérait que le produit était assimilable à une huile de poisson se présentant sous la forme de triglycérides relevant de la position 1516 10 90 avec un droit de douane moindre qu’au 2106 90 92.
Dans le cadre du litige, un règlement d’exécution 2019/1661 avait été adopté le 24 septembre 2019 après avis du Comité du Code des douanes.
Les experts avaient retenu la position 2106 90 92. La CJUE a, en définitive, suivi les experts, validé implicitement le RTC et explicitement le règlement 2019/1661 dont la légalité était également contestée par l’importateur. Toute la question était de savoir si la position 1516 incluait une huile de poisson se présentant sous la forme d’esters éthyliques, obtenue par estérification d’acides gras avec de l’éthanol.
S’appuyant sur les notes explicatives de la nomenclature du système harmonisé (NESH) « une caractéristique propre aux graisses et aux huiles est qu’elles se composent principalement d’esters de glycérol et d’acides gras, prenant la forme de triglycérides. » La Cour ajoute que « partant, un produit qui serait constitué principalement d’esters éthyliques, qui sont des d’esters synthétisés obtenus à partir de l’éthanol et d’acides gras, ne serait pas couvert par la position 1516 de la NC. » (point 38)
Après avoir examiné l’une après l’autre les différentes opérations permises dans le cadre de la position 1516, la CJUE en a écarté l’application. Elle a fait également remarquer que l’Organisation Mondiale des Douanes avait également statué dans ce sens en mars 2018 et classé un produit similaire à la position 2106 du système harmonisé (point 40). Par conséquent, la CJUE a validé le règlement de classement de 2019 au motif que le produit en litige correspondait à la description faite du produit-type, objet du règlement de classement.
Véhicules pour personnes à mobilité réduite
Un arrêt du 28 novembre 2024 (affaire jointe C-129/23 et C-167/23) a conduit la Cour de justice à confirmer sa jurisprudence Invamed Goup du 26 mai 2016 (C198-15) que nous avions commentée dans notre Lettre d’informations n°19 de mai 2016.
Il s’agit du point de savoir si les petites voitures de marque « SELVO » peuvent être considérées en tant que « fauteuils roulant et autres véhicules pour invalides, même avec moteur ou autre mécanisme de propulsion » relevant d’une position exonérée de droit de douane 8713 90 00 ou si, comme le soutenait l’administration douanière du pays importateur, la République Tchèque, il s’agirait simplement d’un véhicule à classer à la position 8703 10 18 de la nomenclature combinée.
Un règlement 2021/1367 du 6 août 2021 avait également procédé au classement d’une marchandise similaire dans la position 8703.
La CJUE a rappelé sa jurisprudence Invamed précitée, ainsi qu’un arrêt du 22 décembre 2010, Lecson Elektromobile (C-12/10) qui retient que la position 8713 ne peut s’appliquer qu’à des véhicules « conçus uniquement pour le transport de personnes invalides. Tel n’est pas le cas de ce véhicule qui peut être utilisé pour des personnes âgées ayant des problèmes de santé légers. »
La CJUE a également considéré que la décision d’homologation technique de l’administration tchèque afin que ce véhicule puisse servir pour des invalides relève d’une réglementation distincte de la matière douanière, de sorte qu’elle ne peut pas avoir d’effet pour la solution du litige du classement tarifaire (point 50).
Dans cette affaire la Cour de justice a tenu compte de la destination inhérente du produit en cause qui doit « être appréciée en fonction des caractéristiques et des propriétés objectives du produit » (point 54). Ainsi, un véhicule qui n’est pas exclusivement destiné aux personnes invalides ne peut pas bénéficier du classement dérogatoire à la position 8713 et relève de la position plus générale 8703 dans laquelle de nombreux véhicules sont classés par ailleurs.
Ainsi, la Cour a-t-elle décidé que « la position 8713 de la NC doit être interprétée en ce sens qu’elle ne couvre pas une marchandise telle qu’un véhicule à quatre roues doté d’un moteur électrique, qui comporte une seule place, dispose d’un siège réglable et pivotant avec accoudoirs, d’une colonne de direction distincte, ainsi que d’un frein automatique électromagnétique agissant sur les roues arrière, lesquelles sont conçues pour empêcher le basculement, qui est commandé au moyen d’un guidon de forme ovale fermée, situé sur cette colonne de direction et dont la vitesse maximale est supérieure à 10km/h sans toutefois dépasser les 16km/h. »
Cette marchandise relèverait donc de la position 8703.